Il va falloir encore un peu de temps à cette équipe de France féminine pour montrer son vrai potentiel, du moins celui qu’elle montrait encore quelques mois en arrière, avec la troisième place à la Coupe du Monde de Rugby 2021. Avec l’arrivée d’un nouveau binôme d’entraîneurs-sélectionneurs – Gaëlle Mignot et David Ortiz – et le départ d’un certain nombre de cadres après la Nouvelle-Zélande, cette équipe va mettre un certain temps à se reconstruire.

« Je crois qu’on ne va pas avoir d’autre choix que d’être patient », admet laura Di Muzio, consultante en rugby féminin et commentatrice des matchs du XV de France féminin pour France Télévision. « Ce nouveau staff doit imposer son style, sa patte. C’est normal d’avoir cette reconstruction. Après, il va falloir mettre la marche en avant parce que 2025 va arriver très rapidement. C’est aussi un groupe qui se cherche, qui est en rodage. Preuve en est la nomination d'une nouvelle capitaine (Audrey Forlani, ndlr) qui, elle aussi, doit endosser ce nouveau rôle et amener cette touche supplémentaire. »

UN JEU PARFOIS APPROXIMATIF

L’écart de dix points dans le score final trahit en partie la difficulté qu’ont eue les Françaises face à des Italiennes coriaces sous une pluie diluvienne, notamment en seconde période. « Je pense qu'on est resté sur notre faim », assène Laura Di Muzio. « En fait, la victoire est là, bien sûr, mais je suis restée sur ma faim parce que j’espérais un point de bonus offensif qui me paraissait logique d’un point de vue historique, mais aussi du fait de la physionomie du match.

« Je les ai trouvées plus fébriles, avec moins d'automatismes, beaucoup de fautes de main (27 contre 17, ndlr)… Mais malgré tout, avec la domination physique et la difficulté des Italiennes en conquête font que ce match se déroule bien, même si elles ne se mettent jamais à l’abri avant la 73ᵉ. Mais contre une équipe comme l'Angleterre, ce genre de match ne pardonne pas.

« Il y a eu des moments de précipitation, on a sorti les ballons avec des passes imprécises (20 passes sur 153 contre 15 sur 133, ndlr), on a fait des en-avants (7 contre 2, ndlr), le ballon glissait fort. On n'a pas su s’en tirer alors qu’il y avait vraiment la place pour le faire. Je pense que c'est plus dû à notre imprécision offensive qu’à la qualité défensive des Italiennes.

« On a enchaîné parfois trois, quatre temps de jeu à une seule passe en se disant qu'on allait physiquement les dominer - puisque c'était le cas depuis le début du match - et gagner nos duels offensifs. Sauf qu’elles mettaient bien les mains et qu'il y avait des espaces sur les extérieurs. Et quand tu vois la qualité de nos ailières sur les extérieurs, on pouvait aller chercher ce point de bonus offensif. »

La France pointe à la troisième place du classement provisoire après les victoires bien plus convaincantes de l’Angleterre (58-7 contre l’Ecosse) et du Pays de Galles (31-5 contre l’Irlande). Dominante en possession (54%) comme en occupation (60%), la France va devoir concrétiser sur ses temps forts.

CONCRETISER SUR LES TEMPS FORTS

Alors que la France a passé deux fois de temps que l’Italie dans les 22 adverses, ce sont les Italiennes qui ont été plus réalistes avec une moyenne de 2,4 points par visite contre 1,4 point pour les Françaises. Reste que la mêlée a été l’un des points forts des Bleues avec 100% de réussite (contre 77,8%) face à une Italie qui a été pénalisée à six reprises (jamais pour la France).

« J'ai été impressionnée par la mêlée française », remarque laura Di Muzio. « Ce sont des images que l’on n’a pas l'habitude de voir à ce niveau : la première ligne italienne qui a les pieds décollés, la mêlée qui se retourne complètement… Donc ça, c'est un super élément de satisfaction. Et justement, quand tu es tellement dominateur en conquête, ça devrait dérouler plus facilement, et c'est ça en fait qui est frustrant. Cette frustration, elle vient de cette combinaison. »

Malgré cette performance décevante - au regard de ce que la France a su produire ces dernières années ! - pas de quoi en revanche entamer l’état d’esprit de cette équipe qui arborait sur le terrain des sourires qui faisaient plaisir à voir.

« Je pense que c'est important dans la mesure où c'est quand même un groupe qui a vécu une Coupe du Monde difficile en interne, avec des tensions, avec des problématiques, avec le staff que l'on a découvert, avec maintenant le changement de sélectionneur. Je pense que c'est un groupe qui avait besoin de relâcher la pression. A mon avis, c'est important aussi qu'elles recréent une ambiance de travail plus sereine, plus apaisée où peut-être elles vont pouvoir un peu plus se lâcher. Donc ça, pour moi, c'est vraiment extrêmement important que le nouveau staff arrive tout juste à mettre en place », affirme la commentatrice.

Photo : France Rugby