En tant que trois-quarts centre géorgien, Nika Amashukeli a été en contact direct avec certaines des stars actuelles du Tournoi des Six Nations.

Mais plutôt que de suivre l'exemple de Maro Itoje et d'atteindre le sommet du rugby en tant que joueur, le jeune homme de 27 ans a choisi d'être arbitre.

Lorsqu'il entrera sur le terrain de l'Aviva Stadium de Dublin, pour le match qui opposera l'Irlande à l'Italie le 27 février, Amashukeli deviendra la première personne n'appartenant pas aux équipes majeures à arbitrer dans le Tournoi des Six Nations.

Le fait qu'il vienne de Géorgie, où la participation au Tournoi des Six Nations est toujours un sujet de débat, rend cette convocation encore plus symbolique.

« Il y a eu des réactions énormes depuis que la nouvelle de ma convocation est sortie et j'ai été dépassé par les gens qui me félicitaient et me témoignaient leur soutien - en Géorgie et à l'étranger », explique-t-il.

« Je vais tout faire pour justifier cette convocation et représenter fièrement mon pays lors de ce brillant tournoi.

« Quand j’étais gamin, c'était un rêve de regarder le Tournoi des Six Nations. À l'époque, il n'y avait même pas de retransmission en direct. Alors on devait se rendre dans notre club et espérer que quelqu'un avait mis les meilleurs moments des matchs sur YouTube.

« Pour les Géorgiens, le Tournoi des Six Nations est toujours un grand moment, et y participer est quelque chose de très spécial, je ne peux pas le décrire. »

Un voile sur SES AMBITIONS DE JOUEUR

En fonction du groupe qui sera retenu ce jour-là, Amashukeli pourrait bien se retrouver à arbitrer Billy Burns lors de la troisième journée du Tournoi des Six Nations 2022. Le demi d'ouverture irlandais faisait en effet partie de l'équipe d'Angleterre U18 qui a mis la Géorgie à genoux lors du Tournoi FIRA/AER en 2012, alors qu'Amashukeli jouait encore.

« Anthony Watson devait venir sur ce tournoi ainsi que Maro Itoje et Billy Burns, mais il a été retenu par les U20 parce qu’il était très bon », se souvient Amashukeli. « J'en étais très heureux car je devais jouer contre lui en tant que trois-quarts centre ! Ils nous ont détruit, mais c'était une bonne expérience, pour voir à quel point les joueurs de niveau élite sont bons. »

Après avoir subi d'innombrables blessures, dont une fracture de la cheville et des problèmes au genou, Amashukeli n'a pas tardé à décider de prendre sa retraite sportive - pour sa propre sécurité et la tranquillité d'esprit de sa mère.

« J'ai cherché à trouver quelque chose d'autre qui ne soit pas aussi exigeant physiquement mais qui me permette de rester dans le rugby. Et l'arbitrage était la meilleure option pour y parvenir », assure-t-il.

« J'étais assez jeune pour prendre le sifflet mais ça a plutôt bien marché pour moi et petit à petit, je suis arrivé à ce niveau. »

Amashukeli a fait ses débuts en tant qu'arbitre international lors de la rencontre entre le Monténégro et l'Estonie en 2015, ce qui est loin de l'ambiance incroyable qu'il connaîtra lorsqu'il donnera le coup de sifflet pour lancer le match à Dublin dans six semaines.

« Une mi-temps a été arbitrée par un autre Géorgien, Shota Tevzadze, que je connais depuis l'âge de six ans et qui est un bon ami, et l'autre mi-temps par moi, ce qui a été une expérience en soi », se souvient-il.

« Les joueurs du Monténégro sont arrivés avec des protections des genoux jusqu'aux chevilles et ils n'étaient pas très contents quand je leur ai dit de les enlever parce que c'était contraire aux règles du jeu.

« C'est quelque chose d'incroyable que d'être arrivé là où je suis aujourd'hui, d'autant plus que je suis encore relativement jeune pour un arbitre.

« J'apprécie le dévouement et la gentillesse dont les gens ont fait preuve à mon égard, pour m'aider à évoluer en tant qu'arbitre, et je tiens à remercier tout particulièrement ma femme, Maria. C'est pas facile d'être avec moi parce que je suis toujours absent semaine après semaine, mais elle est toujours d'un grand soutien. »

DES PROGRÈS CONSTANTS

Après avoir fait ses débuts en tant qu'arbitre de la Heineken Champions Cup, Amashukeli a terminé l'année 2021 en arbitrant la victoire de l'Irlande contre le Japon en novembre. Le Tournoi des Six Nations était donc la prochaine étape naturelle à franchir pour lui.

L'arbitre originaire de Tbilissi affirme que ce parcours n'aurait pas été possible sans les conseils avisés du responsable des arbitres de la fédération géorgienne de rugby, David McHugh, et du responsable des officiels de match de World Rugby, Joel Jutge.

Bien que la plupart de leurs observations aient été positives, Amashukeli a révélé que McHugh n'a pas pu s'empêcher de lui jouer un tour.

« Tout d'abord, ils ont décidé de me faire une blague. David a dit que j'avais des convocations pour le Tournoi des Six Nations, mais en tant qu'assistant. Puis il m'a montré la liste des convocations et mon nom était inscrit en tant qu'arbitre principal et je suis resté bouche bée. J'ai dit : "Vous plaisantez, vous plaisantez ?  C'était incroyable parce que je ne m'y attendais pas.

« On m'a dit de ne rien dire, ce qui a probablement été la partie la plus difficile car, comme je l'ai dit plus tôt, toute nouvelle concernant la Géorgie et liée aux Tournoi des Six Nations est une grande nouvelle.

« Je travaille avec David depuis quatre ans maintenant, et cela aurait été impossible sans son aide et son travail dans l'ombre. C'est un homme formidable et un excellent rugbyman. Il est très professionnel et je suis très heureux que la Géorgie l'ait engagé pour deux ans.

« Joel Jutge est également un homme brillant et l'un des meilleurs managers avec lesquels j'ai travaillé : il est très accessible, très calme, et si vous lui expliquez certaines situations, il vous en parle en conséquence. Il m'a donné des conseils très précieux tout au long de ma carrière, je lui suis donc redevable à lui aussi. »

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