En novembre 2020, Tiara Mack est devenue la première personne noire ouvertement LGBTQ à être élue au Sénat de l'État de Rhode Island.

Elle était auparavant une politicienne réservée. Son parcours vers la fonction publique avait commencé plus de huit ans auparavant, lorsqu'elle s'est inscrite à l'Université de Brown et qu'elle s'est lancée dans deux nouvelles passions : le militantisme communautaire et le rugby.

« Je ne me vois absolument pas comme une femme politique », explique Tiara Mack à World Rugby. « Mais je pense que tout ce que j'ai appris grâce au rugby a fait de moi une véritable dirigeante.

« Le rugby, du moins les communautés de rugby dont j'ai fait partie, ont toujours existé tout comme les identités marginalisées - les homosexuels, les noirs, les peuples indigènes, les transgenres, les personnes à faibles revenus.

« Le rugby ne demande pas beaucoup d'argent. Vous avez un ballon, des crampons (chaussures), vous pouvez même jouer en chaussures, c'est un sport pour tout le monde.

« Je pense que les problèmes sociaux viennent en partie du fait que l'on connaît des gens de milieux très différents et que l'on se bat pour cela et pour ces identités. »

Une passion est née

Tiara Mack a été initiée au rugby à l'âge de 14 ans, lorsque son frère aîné Malik a commencé à jouer à l'université de Géorgie.

Elle avait aimé le regarder jouer et donc, lorsque, quelques jours après avoir posé le pied sur le campus, elle a reçu un courriel de Kerri Heffernan, alors entraîneur de l'équipe féminine de Brown, elle a décidé de se rendre à l'entraînement.

Elle a été attirée par le contact qu'offre le rugby et est rapidement devenue accro, jouant tout au long de ses études universitaires, à l'exception d'une courte pause due au décès de son grand-père.

Mack a fait sa première apparition en tant que remplaçante de deuxième-ligne dans l'équipe bis à XV, mais elle est devenue capitaine de l'équipe première et a même été sélectionnée comme All-American au cours de sa dernière année.

« J'ai assisté à mon premier match, à l'automne de ma première année et c'est là que j'ai su. Je me suis dit : 'Wow, je crois que j'aime vraiment ça' », se souvient-elle.

« Nous avions tellement de gens très performants, tant sur le terrain qu'en dehors. Jouer à un tel niveau avec des gens aussi performants... non seulement je voulais en faire partie, mais c'était un honneur. »

JOUER POUR « TATA KATHY »

Jouer pour Brown a également permis à Tiara Mack d'entrer en contact avec certaines figures légendaires du rugby féminin.

Après avoir été entraînée par Heffernan en première année, Mack a travaillé sous la direction de Kathy Flores, championne du Monde de Rugby, pendant le reste de sa carrière universitaire, puis, après avoir obtenu son diplôme, à Providence Women.

Kathy Flores, qui est décédée en octobre dernier, est devenue à la fois son mentor et une amie. « Elle était tellement drôle », se souvient Mack.

« Lors de son premier entraînement, c’était une boule d'énergie et de lumière. Elle passait de la Motown à l'entraînement et avait tous ces mouvements de danse. Elle savait comment relâcher la tension.

« Il y avait beaucoup de tension et de stress dans l'équipe, et Kathy avait cette façon géniale de dire : "OK, l'entraînement va se résumer à des jeux, nous allons jouer à des jeux de technique très intéressants". Et parfois, c'était juste des jeux stupides.

« Kathy était aussi le genre de personne qui prenait les joueuses à part et les rencontrait en tête-à-tête, les invitait à prendre un café ou un thé à son bureau. Elle était comme cette tante et ce mentor que beaucoup d'entre nous n'avaient jamais eus ou vus.

« Je n'avais eu qu'une ou deux entraîneures en grandissant, et c'était en volley-ball.

« Avoir une femme mûre et sensée qui se souciait si profondément des gens et pas seulement des joueuses. On pouvait être titulaire ou non, et elle nous accordait la même attention. »

Selon Tiara Mack, toutes les joueuses pouvaient bénéficier de l'enseignement de Kathy Flores, qu'elles débutent dans le rugby ou qu'elles soient en passe de devenir des internationales à part entière.

L'amour de Kathy Flores pour le rugby était si contagieux, selon Mack, que ses joueuses voulaient jouer aussi longtemps que leur corps le leur permettait.

« L'une des meilleures choses lorsqu'on joue pour Kathy, c'est qu'elle vous donne envie de jouer pour toujours », dit-elle.

Étant donné le temps qu'elle consacrait à chacune de ses joueuses, il n'est pas surprenant que Kathy Flores ait immédiatement soutenu la campagne électorale de Mack.

« Kathy Flores a été la première personne à dire : "Comment puis-je t'aider ?". [Elle s'est inscrite pour des dons mensuels, elle a vendu du merchandising, elle a tout fait », raconte Mack.

« C'est fou de penser qu'elle était une telle légende parce qu'elle a investi tellement de temps et a fait en sorte que chaque personne se sente importante. »

METTRE EN PLACE UNE STRATEGIE POLITIQUE

Les graines de la carrière politique de Tiara Mack ont été semées à Brown lorsqu'elle a commencé à enseigner l'éducation sexuelle dans les lycées locaux et à faire du bénévolat dans des associations caritatives pour la défense des femmes.

Son intérêt pour le militantisme communautaire et le rugby s'est également conjugué à cette époque, lorsqu'elle a participé à un procès intenté contre l'université en vertu de l'article IX.

Le rugby fait toujours partie intégrante de sa vie. Tiara Mack continue de jouer pour Providence et ses responsabilités en tant que sénatrice d'État n'ont eu un impact sur son temps de jeu qu'une seule fois depuis son élection.

« Beaucoup de ce que j'ai appris au rugby se transpose dans la vie réelle. Je veux dire, la politique est un excellent exemple », affirme-t-elle.

« Dans la Chambre, sur le terrain, nous sommes tous égaux, peu importe d'où vient l'autre.

« Vous pouvez être la meilleure joueuse, vous pouvez être la joueuse la plus rapide sur le terrain mais si vous n'avez pas le ballon, ça ne sert à rien.

« Si vous ne mettez pas en place des stratégies de jeu, si vous n'utilisez pas les espaces du terrain, peu importe que vous soyez la plus rapide. Si vous ne recevez jamais le ballon, si vous ne trouvez jamais l'espace libre, vous n'aurez jamais cette chance.

« C'est la même chose lorsqu'on travaille dans un groupe de 36 autres parlementaires. Peu importe si j'ai la meilleure idée, l'idée la plus logique, l'idée la mieux documentée.

« Si je ne travaille pas avec tout le monde dans cette Chambre pour que ce projet de loi soit adopté, si je ne collabore pas avec mes collègues, ça ne marchera jamais. »

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