L'Anglaise Katy Daley-Mclean a eu quelques semaines pour s'habituer à sa vie d'ancienne joueuse avant que la nouvelle de sa retraite internationale ne soit annoncée le vendredi avant Noël 2020.

Elle avait pris cette décision après en avoir discuté avec le sélectionneur de l'Angleterre Simon Middleton, avec la responsable de la performance féminine de la RFU, Nicky Ponsford, et ses coéquipières.

Katy Daley-Mclean s'avouait alors satisfaite de partir à ses propres conditions, pour passer plus de temps avec sa petite famille. Mais rien de tout cela ne l'avait préparée au déluge de messages qui a suivi l'annonce.

« La réaction a été totalement incroyable », raconte-t-elle à World Rugby. « Le nombre de personnes qui m'ont envoyé des messages, dans la communauté rugby, était tout simplement incroyable et ça m'a pas mal étonné. »

Légende est un mot qu'on utilise fréquemment dans de pareils cas. Mais ce qualificatif est parfaitement adapté à Daley-Mclean. Elle est en effet la troisième joueuse la plus capée de l'Angleterre pour avoir représenté son pays 116 fois.

Sa carrière s'est étendue sur 13 années pendant lesquelles elle a participé à trois finales de Coupe du Monde de Rugby, dont la deuxième s'est soldée par une victoire, lors de France 2014.

Un manque de jus

Elle n'a pourtant pas voulu décrocher tout de suite, trop attirée par une quatrième Coupe du Monde de Rugby et une nouvelle tournée en Nouvelle-Zélande. Mais à ces échéances sportives, elle a préféré le confort familial de passer plus de temps avec sa fille Addie.

« Lorsque je me suis posée et que j'ai regardé sur le calendrier tout le temps pendant lequel je serais absente, ça m'a calmé tout de suite », admet-elle.

« Mais la façon dont je gérais les entraînements avait changé aussi. Et je pense que tout ça cumulé m'a obligé à avoir cette introspection sur moi-même et sur ce que je voulais faire. J'ai toujours été extrêmement compétitive et dès que ce moteur ne répondait plus, j'avais plus de mal à me lever, à aller courir, ce qui posait question, d'autant plus dans un sport d'équipe où vous ne pouvez pas vous désolidariser de vos coéquipières.

« Pour moi, tout ça a rendu la décision plus facile à prendre parce que je me disais que je ne pouvais plus continuer. Je ne voulais pas être cette joueuse, pas être cette sportive. Alors, oui, c'était probablement une décision difficile à prendre. Mais, en fait, la décision en elle-même, une fois que j'avais identifié mes raisons et ce que je ressentais à son égard, était assez logique. »

Moins d’une quinzaine de jours avant que sa retraite internationale ne soit confirmée, Katy Daley-Mclean a été sélectionnée comme demi d'ouverture du XV féminin de la Décennie établi par World Rugby, en association avec Mastercard.

Cela en a surpris plus d'un qui l'ont regardée diriger l'Angleterre vers huit tournois du Grand Chelem féminin au Tournoi des Six Nations. Car elle ne s'est sentie vraiment à l'aise avec le maillot numéro 10 qu'une fois qu'elle a eu 30 ans. Et à ce moment-là, elle était déjà championne du monde.

« Autour de mes 30 ans, j'étais vraiment à l'aise avec ce qu'on attendait de moi et avec mes responsabilités », dit-elle. « Mais avant, je jouais plus aussi. En tant que 10, en fait, il faut voir l'ensemble. C'est surtout sur le jeu en général et tout ce qui en découle.

« Vous savez, le rugby est finalement un sport assez simple. Il s'agit de performance et d'aller de l'avant et, si vous avez tout ça, c'est plus souvent facilement à jouer. Je pense que c'est plus tard dans ma carrière que j'ai commencé à voir l'impact de ce que je faisais en tant que 10 et les différences, l'impression que le jeu ralentissait un peu. C'était un peu comme le regarder au ralenti. Vous pouviez presque voir ce qui allait se passer ensuite, comme aux échecs. »

Son aventure avec l'Angleterre

De son propre aveu, Katy Daley-Mclean a connu un « début parfait » de sa carrière internationale, avec une défaite de l’Écosse 60-0 lors du week-end d’ouverture des Six Nations féminines 2007 à St Albans. Elle était remplaçante en seconde période aux côtés de sa future capitaine, Sarah Hunter.

« Ma mère, mon père et ma petite sœur étaient dans le public. Je pense que mon plus grand sentiment a été le soulagement, de juste pouvoir continuer après », raconte-t-elle. « Geoff Richards était l'entraîneur à l'époque et il n'était pas du genre à distribuer les sélections pour faire plaisir. »

La première grosse désillusion de Katy Daley-Mclean sous le maillot anglais est survenu à la RWC 2010, lorsque les hôtes ont été devancés par la Nouvelle-Zélande en finale au Twickenham Stoop, s'inclinant au terme d'un match âprement disputé, 13-10.

« En fin de compte, être si près de gagner quelque chose, c'était vraiment, vraiment très difficile d'y arriver », analyse-t-elle aujourd'hui. « Mais évidemment, cela vous donne envie de revenir meilleures et plus fortes et ça vous donne beaucoup de leçons. »

Cette expérience, bien que difficile à vivre et à accepter à l’époque, s’est avérée inestimable pour les Red Roses quatre ans plus tard, lorsque Daley-Mclean a mené une équipe anglaise rajeunie jusqu'au sommet du rugby féminin mondial.

« Après 2010, ce groupe revenait de très loin ! Nous étions allés en Nouvelle-Zélande en 2013 où nous avions perdu nos trois matches, puis ce match contre la France dans les Six Nations. Si bien que cette victoire en 2014 ne concernait pas seulement notre groupe, mais toutes les autres joueuses avant nous.

« Nous avions essayé tant de fois auparavant, je pense trois fois, de gagner une Coupe du Monde et nous avions été battues. Donc en fait, pour moi, il s'agissait de la victoire de toute une famille, de toutes les Red Roses. Et, oui, c'est de loin le moment où j'ai été la plus fière, avec ce groupe, ce staff, ces joueuses. C'était énorme. »

Se fixer de nouveaux objectifs

Maintenant tournée vers l’avenir, Katy Daley-Mclean se sent motivée par l’opportunité qu’elle a, avec les Sale Sharks, de se développer en tant qu’entraîneure et d’aider à établir une base de joueuses dans le nord-ouest de l’Angleterre.

Elle a également hâte de suivre les Red Roses en tant que fan et est convaincue que le maillot numéro 10 se trouve aujourd'hui sur de bonnes épaules avec Zoe Harrison et Helena Rowland, parmi celles qui en revendiquent la propriété.

Mais Katy Daley-Mclean pourrait-elle un jour revenir au rugby international en tant qu'entraîneure ? « Simon Middleton, attention ! », rigole-t-elle lorsqu'on lui pose la question. « J'essaie que ça n'arrive pas, mais parfois je m'emballe un peu. Je me demande si moi-même je pourrais le faire. Mais je sais que j'ai tellement à apprendre et que ça me plairait tellement.

« Pour moi, c'est génial, j'adore les défis et c'est un nouveau défi à relever, d'en apprendre davantage sur sa culture, et sur la façon dont vous dirigez les équipes de performance. J'ai toujours été du côté du jeu, alors apprendre tous les autres aspects serait formidable. »

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