Sandy Park a accueilli quelques grands matches au cours des dernières années, mais celui du samedi 7 novembre a été encore plus symbolique. Ce jour-là, les féminines des Chiefs d'Exeter ont remporté leur toute première victoire en Premier 15s.

Des essais de Lottie Holland, Emily Tuttosi et Laura Delgado ont permis la victoire 19-7 contre les Warriors de Worcester, près de 14 mois après la création de l'équipe.

Cette victoire est une belle récompense pour tout le travail réalisé par l'entraîneure Susie Appleby et son adjointe Amy Garnett depuis que les Chiefs ont annoncé la création d'une équipe féminine en septembre 2019.

A ce moment-là, Exeter n'était pas sûr de se maintenir dans le Premier 15s et le sens de la loyauté de Susie Appleby envers Gloucester-Hartpury – le club qui l'a hissé au top niveau – était encore très fort jusqu'en janvier.

Cependant, Susie Appleby et Amy Garnett avaient reçu la garantie de la part d'Exeter qu'il ne s'agissait pas là de paroles en l'air et que l'opportunité de travailler conjointement avec un grand club était réelle.

« Leur ambition n'a aucune limite ; ils veulent juste que l'équipe féminine soit aussi performante que l'équipe masculine », explique Susie Appleby (65 sélections avec l'Angleterre) à World Rugby.

« Ils m'ont demandé ce dont j'avais besoin pour commencer et je leur ai répondu que, mis à part Amy et moi-même, on devait pouvoir compter sur un préparateur physique et un kiné à plein temps. Car sans eux, on n'irait nulle part. Ils ont dit banco tout de suite. Ils ont mis les moyens à la hauteur de leurs ambitions. »

La chose la plus difficile

Amy Garnett, la première joueuse anglaise à avoir passé le cap des 100 sélections, a récemment déménagé dans le Sud-Ouest pour se rapprocher d'Exeter. En avril, elle et Susie ont confirmé qu'elles s'engageaient avec le club pour au moins les trois prochaines années.

Un tel ticket laissait présager de beaux lendemains, même si la pandémie de Covid-19 qui s'est déclarée entre temps a pu perturber quelque peu les plans. Privées de structures physiques, elles se sont vite tournées vers les visio pour en faire leur nouveau terrain de jeu.

« C'est la chose la plus difficile qu'il m'ait été donnée de faire », admet Susie Appleby lorsqu'elle parle de la façon dont elle a mis sur pied son équipe en pleine pandémie. « Tant qu'on n'avait pas passé un maximum de coups de fil et qu'on n'avait pas fait venir des joueuses, on n'y croyait pas. On ne savait même pas où on allait !

« Et puis après le mois d'avril, lorsque tout s'est mis en place, tout est devenu plus réel. Pourtant, on ne pouvait pas montrer ce que ça allait donner à cause de la pandémie. Et malgré ça, tout le monde a suivi. »

Compter sur les talents locaux

Le mercato a attiré des joueuses de grand talent - Olivia DeMerchant, Patricia Garcia, Linde van der Velden et Kate Zackary – qui se sont engagées sur une saison. La paperasserie et les mesures de quarantaine ont tellement duré que le groupe n'a pu se rencontrer pour la première fois que lorsque le Premier 15s avait déjà repris.

Ce n'est pas un hasard si deux des essais marqués samedi 7 novembre l'ont été par des joueuses venues de l'étranger avec les transformations passées par l'internationale américaine Gabby Cantorna. Pourtant, la politique maison est de compter sur des pépites locales comme les garçons ont pu le faire par le passé avec Luke Cowan-Dickie, Jack Nowell et Henry Slade parmi d'autres.

« Le père de Kayleigh Armstrong, qui vient d'Exmouth, jouait pour les Chiefs et elle nous a confié que jamais elle aurait pensé qu'elle pourrait jouer un jour dans une équipe féminine des Chiefs », raconte Amy Garnett.

« Le rugby est quelque chose d'énorme ici. Il bénéficie d'une grosse couverture médiatique et nos matches sont retransmis, si bien que les jeunes joueuses peuvent vite s'identifier. Et espérons que cet engouement serve à l'avenir des Chiefs. »

Le club a pris sous son aile sept joueuses en formation pour la saison grâce à un programme mené en commun avec le Exeter College. En attendant que l'équipe se retrouve physiquement à la nouvelle année, tout se fait par Zoom.

« Ça fait déjà un an qu'on a lancé le programme et on commence déjà à en récolter les fruits », observe Susie Appleby. « Les jeunes joueuses de Devon et Cornwall, qu'on n'aurait sans doute jamais eu la chance de croiser et qui n'aurait pas eu la chance de jouer, étaient obligées de faire la route jusqu'à Bristol. Désormais, elles peuvent rester ici, s'entraîner et se former sans jamais quitter le comté. »

Un travail en collaboration

Petit à petit, les équipes hommes et femmes vont apprendre à partager les mêmes équipements, les mêmes ressources et la même connaissance. Certes le Covid-19 a limité au maximum les interactions entre les deux groupes, mais les entraîneurs de l'équipe masculine, Rob Hunter et Ricky Pellow, ont déjà pu accompagner Susie Appleby et Amy Garnett sur plusieurs entraînements cette saison.

De son côté, Julian Salvi, entraîneur adjoint en charge de la défense, a pris en main les filles pour en faire la meilleure défense du Premier 15s. « C'est quand même incroyable d'avoir pu se lancer dans cette aventure avec un tel soutien du club », s'émerveille encore Susie Appleby.

« On a pu bénéficier de toutes les structures du club et je ne parle pas uniquement du matériel, mais par exemple du soutien des équipes marketing et du fait que tout le monde a été aux petits soins pour nous permettre de travailler à temps plein avec les joueuses. C'est ce qui fait la force de tout un club. »

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