Chantel John ne fait pas les choses à moitié. Joueuse accomplie, arbitre internationale et officier de police en première ligne de la pandémie de Covid-19 à Sainte-Lucie, ce petit État des Caraïbes.

Chantel a vu le rugby grandir à Sainte-Lucie, en particulier le rugby féminin, depuis qu'elle-même a commencé à s'y intéresser en 2004. A ce moment-là, toute l'activité rugby de l'île se concentrait sur le terrain de son école. Pas facile d'y échapper. Alors joueuse de foot, Chantel s'est convertie au rugby sur conseils d'une amie.

A cette époque, les joueuses de rugby ne couraient pas les rues sur l'île de 620 km2. Il était d'ailleurs parfois difficile de constituer une équipe nationale. Mais très vite Chantel y a pris du plaisir et y a trouvé sa place. Et comme elle dit, « tout le monde avait les yeux braqués sur vous ».

A mesure que le rugby s'est développé, Chantel John est devenue membre puis capitaine des Whiptail Warriors, l'une des plus importantes équipes de l'île.

Une accélération depuis 2009

Très vite, elle a intégré l'équipe nationale et a même joué pour Sainte-Lucie en janvier 2020 lorsque la team a remporté le Martinique Women's Sevens. Elle a essayé de se lancer dans l'arbitrage, mais les entraîneurs et les joueuses ne cessent de faire appel à elle. « A croire qu'ils aiment bien être avec moi », sourit-elle.

Son meilleur souvenir de joueuse, c'était la deuxième place au Rugby Americas North 2009 à Mexico, à l'époque où on l'appelait encore le NACRA. Le rugby féminin n'en était qu'à ses débuts à Sainte-Lucie et ce résultat avait permis d'accélérer son développement. Depuis, Chantel a mené l'équipe nationale à de nombreuses occasions et a pu décrocher de précieuses victoires dans les Caraïbes. Mais le tournoi de Mexico reste son préféré.

Même si le XV est présent dans cet État insulaire, c'est le 7 et le X qui sont le plus pratiqués. La croissance est bonne sous la présidence de Colvis Samuel grâce au travail du directeur du rugby de l'île, Wayne Pantor, qui n'a de cesse de sillonner ce pays fou de foot pour faire connaître le rugby partout. Mais selon Chantel John, l'avenir s'annonce radieux.

L'appel du sifflet

C'est en 2015 qu'elle a décidé de prendre le sifflet pour la première fois et, depuis, prend énormément de plaisir à souffler dedans chaque fois que nécessaire. Son premier match était un match masculin sur l'île. On l'a ensuite vu dans les différents tournois de Rugby Americas North (RAN) en 2019 comme le Tropical Sevens aux USA, le Barbados World Rugby Sevens et d'autres.

Déjà en tant que joueuse, elle s'était efforcée de bien comprendre les règles pour mieux les appliquer sur le terrain. Et cette approche a été essentielle lorsqu'elle est devenue arbitre. Encore aujourd'hui, approfondir les règles, c'est ce qui la passionne le plus à tel point qu'elle a reçu le Prix de Officier Technique de l'Année en 2018 et 2019.

A l'en croire, tout le crédit en revient à Scott Harland, chargé du développement à RAN, qui a joué un rôle décisif au moment où elle est passée de l'autre côté et qui l'épaule à chaque fois lorsqu'il s'agit de passer en revue ses performances. Elle cite aussi Rasta Rashivenge et Nigel Owens parmi ses modèles et aimerait secrètement un jour arriver à un tel niveau de professionnalisme.

L'esprit de camaraderie qui règne dans la communauté des officiels de match lui a laissé bonne impression, retrouvant la même chaleur qu'entourée d'autres joueuses.

L'équilibre entre sa carrière et le rugby

Pendant la pandémie, la vie n'a pas été un long fleuve tranquille à Sainte-Lucie pour cet officier de police depuis 14 ans maintenant. Elle a dû non seulement faire respecter l'ordre, mais aussi plus spécifiquement le port du masque, notamment dans les magasins.

Mais parce que le nombre de cas n'a pas été très élevé – une vingtaine début juillet 2020 dans ce petit État de plus de 166 000 habitants – Chantel regrette que la menace n'ait pas été prise suffisamment au sérieux.

Aujourd'hui, Chantel John est prête à reprendre une vie normale et ambitionne d'arbitrer sur le World Rugby Sevens Series. Comme tous les autres arbitres en ce moment, elle suit un programme individualisé pour maintenir sa condition physique et réviser les règles. Prête à repartir.