Une chose est sûre : les Italiennes n'ont pas volé leur victoire lors de cette cinquième et dernière journée du Tournoi des 6 Nations féminin à Padoue. 31-12, score sans appel : quatre essais d'un côté et deux de l'autre. « Les Italiennes m'ont impressionnée dans leurs attitudes au contact. J'ai rarement vu ce niveau d'engagement et sur les rucks. C'était très propre. Je pense que les filles ont été cueillies à froid et elles n'ont pas su rebondir derrière », analyse Laura di Muzio, consultante en rugby féminin qui décrypte les prestations des rugbywomen tricolores. « La progression entre l'année dernière et cette année... Je ne sais pas ce qu'elles ont mangé, mais ça n'a rien à voir ! Et pourtant, il y a quand même un noyau dur de joueuses qui reste le même. C'était la belle surprise du Tournoi. »
Les Italiennes ont gagné toutes les batailles : la possession (54% contre 46%), les ballons joués (344 contre 216), les ballons portés (140 contre 97), les mètres parcourus (865 contre 549), les franchissements (9 contre 4), les passes (198 contre 122), les offloads (13 contre 11), les rucks gagnés (110 contre 68)...
"Pour moi, il n'y avait pas de suffisance, mais de la confiance, ce qui était normal. Être suffisantes, ce n'est pas leur genre..."
Les Françaises en revanche sont littéralement passées à côté de cette rencontre. Un résultat qui leur coûte non seulement un point au classement général – 3e du Tournoi derrière l'Angleterre et l'Italie – mais surtout une place au classement mondial World Rugby. Les Tricolores pointent à la 4e place mondial au profit du Canada (3e).
« Les Françaises y sont allées avec leur statut de favorites, ce qui est normal, et les Italiennes avec leur statut d'outsider. Pour moi, il n'y avait pas de suffisance, mais de la confiance, ce qui était normal. Être suffisantes, ce n'est pas leur genre », nuance Laura di Muzio. « Du coup, elles n'ont pas su se remobiliser lorsqu'elles ont commencé à prendre l'eau. A la mi-temps, il y a une pénalité d'écart (8-5, ndlr). Je me disais qu'elles allaient prendre une volée de bois vert et qu'elles allaient repartir. Franchement, je ne pensais pas que l'Italie tiendrait ce rythme 80 minutes. Chapeau bas à cette très belle prestation. Les Italiennes méritaient de gagner. »
Un jeu français très haché
Dans les vestiaires après la rencontre, les explications ont résonné derrière les portes. « Les filles faisaient profil bas lorsqu'elles sont ressorties du debriefing. Elles se sont fait remonter les bretelles comme il se doit dans le vestiaire. Le staff leur a remis la tête à l'endroit ; ça fait partie de l'apprentissage. Samuel Cherouk (l'entraîneur, ndlr) gère son groupe parfaitement. Je pense que lui-même était dégoûté », explique Di Muzio.
"Toutes les munitions, on les a gâchées."
Ce qui a pêché selon elle est la trop grande perte de ballons qui, à ce niveau et même face à l'Italie, ne pardonne pas. « Le nombre de ballons que l'on se fait arracher au contact alors que l'on est même pas au sol (27 turnovers concédés contre 18, ndlr), ça ne ressemble pas à l'équipe de France ! A aucun moment elles ont pu enchaîner, mettre des temps de jeu en place et du coup créer ce rythme si caractéristique qui épuise les lignes en face. Là, c'était très haché comme partie car il y avait un en-avant ou un ballon parti en touche. A ce niveau-là, les munitions sont trop précieuses. Toutes les munitions, on les a gâchées. »
En attaque comme en défense, les Françaises n'ont pas eu le temps de s'adapter au jeu des Italiennes qui ont imposé leur rythme et leur jeu sur le terrain. Grâce à cette performance, les Azzurre grimpent à la 6e place mondiale devant l'Australie et comptent bien peser sur la suite.
Photo: Women's 6 Nations